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22 janvier 2008 2 22 /01 /janvier /2008 02:07

La peinture fait partie de mon univers depuis toujours.
Mon père était peintre. Des gravures, des tableaux couvraient les murs, partout, chez lui, chez ma grand-mère. L'explosion de la couleur, la dextérité des touches, épaisses, chaudes, les contrastes blanc et noir ou encore la lumière éclatante des pueblos, le visage buriné des gitans sous de grands chapeaux de paille fascinaient mon regard d'enfant. D'abord expressionniste puis plus proche de l'Impressionnisme, mon père privilégiait la figuration, jugeant pour lui l'abstraction trop facile.
Cet artiste avait été compagnon de bohème de Bernard Buffet, jouissait de l'estime de Dunoyer de Segonzac, bénéficiait souvent des critiques de son ami Antoine Blondin.

 

Un choix évident mais difficile parce que mon père avait été un grand peintre, connu et reconnu.
Difficile de venir après lui. Difficile aussi de fréquenter les Ecoles d'art pour avoir assimilé par osmose ses techiques.
Exécrable souvenir de la faculté d'Art Plastique de Saint-Charles. Lieu de culte du mauvais goût et du n'importe quoi. Cortège macabre d'étudiants tous habillés de noir, en révérence devant le pouvoir de maîtres aigris, exerçant leur despotisme sur de jeunes esprits.
« N'oubliez pas que vous êtes là pour nous étonner ! », proclamait le Maître du Boudin fait avec son propre sang. 
Ainsi fut-il : un étudiant sérieux souleva d'un geste précieux le couvercle d'un écrin argenté et ciselé pour présenter un oeil de boeuf.
L'ostracisme frappait ceux qui avaient une formation artistique.
« Tu es celle qui peint le mieux dans l'atelier mais, tu vois, ton UV tu ne l'auras pas : « la peinture ce n'est pas de peindre comme un oiseau chante sur la branche », comme disait Renoir ! ».
Effectivement, je n'obtins l'UV de peinture qu'à l'examen de rattrapage quand mon nom fut caché.
Il fallait gratter, user, trouer, déchirer, salir,  jusqu'à l'obtention d'un superbe torchon.
Pour réussir ses examens, il fallait faire profil bas, subir mille affronts, se laisser couler dans le moule de l'art dit contemporain. Bref se laisser convaincre de la beauté du Laid et la laideur du Beau.

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P
Votre père, Robert Fonta peintre et graveur a très bien connu l'écrivain Albert Vidalie, auteur du roman "Les Bijoutiers du clair de lune"; il fut un presque frère pour le parolier des chansons de Monique Morelli, de Serge Reggiani et de Juliette Gréco, comme en témoigne l'extrait de cette lettre adressée à Vidalie en 1958 : "L'autre jour, l'autre soir, j'ai tout à coup senti chez toi une solitude emprunte d'une affreuse tristesse. Question d'antenne, sans doute. J'ai ressenti alors ce besoin amical de me sentir un petit peu ton frère. N'est-on pas solitaire aussi devant son art. Le travail lui aussi n'est-il pas le plus obscur des anonymats. J'ai longuement songé, au long d'une interminable nuit, aux états d'âme d'Albert Vidalie..." Travaillant actuellement à la biographie de Vidalie, j'aimerai en savoir un peu plus sur cette amitié fraternelle. Merci de me contacter sur mon courriel. A bientôt, j'espère. Patrice Ducher
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